En vérité je vous le dis, jusqu'à ce que le ciel et la terre passent, pas un seul "yod", pas un seul trait de lettre de la Torah ne passera, jusqu'à ce que tout soit arrivé.

Evangile de Matthieu 5:18

La présence de ces codes et structures numériques dans la Torah font ressurgir une autre controverse: celui de la transmission du texte au cours des siècles.

 

Jusqu'en 1947, la grande majorité des exégètes et historiens pensait que les textes bibliques avaient inévitablement subis de multiples erreurs de transcription et d'importants remaniements depuis leur origine, comme cela est le cas de tous les textes anciens, recopiés manuellement au fil des siècles.

 

Avant la découverte archéologique de Qumran en 1947, les manuscrits de la Bible en Hébreu les plus anciens que l'on possédait dataient du 9ème siècle (codex du Caire), du 10ème siècle (codex d'Alep), et du 11ème siècle (codex de St-Petersbourg), ce dernier étant le seul exemplaire complet du TANAKH qui nous soit parvenu intact, celui d'Alep ayant été partiellement endommagé lors des émeutes anti-sémites de 1947 en Syrie.

Cette même année, furent découverts dans les grottes de Qumran près de la mer Morte des manuscrits datant du 1er au 2ème siècle av. J-C, c'est à dire antérieurs d'au moins 1000 ans aux plus vieux manuscrits que l'on possédait jusqu'alors.

A l'exception des livres d'Esther et de l'Ecclésiaste, tous les livres du TANAKH y sont représentés, le plus prestigieux étant le grand rouleau du livre d'Isaïe, mesurant plus de sept mètres, le seul qui soit presque complet et le mieux préservé. On découvrit également d'autres manuscrits non bibliques, écrits en Hébreu, en Grec et en Araméen, comme par exemple des règles de vie de la communauté juive essénienne, à qui l'on doit la compilation et la préservation de tous ces documents.

Les exégètes furent alors stupéfaits de constater que le texte massorétique de la Bible hébraïque actuelle était tout a fait semblable à ce texte de 2000 ans d'age, les différences portant essentiellement sur des variantes orthographiques, sur lesquelles nous reviendrons plus loin.

 

Ces manuscrits sont considérés comme étant la plus grande découverte archéologique du 20ème siècle.

Le codex de Saint-Petersbourg
Le codex de Saint-Petersbourg
Manuscrit de Qumran: Le rouleau du livre d'Isaïe
Manuscrit de Qumran: Le rouleau du livre d'Isaïe

Cependant, pour autant que l'on considère la portée extraordinaire de ces découvertes comme une preuve indéniable de la transmission fidèle du texte sacré, elles n'apportent pas de lumières supplémentaires sur la présence des codes dans la Torah.

De plus, la présence de ces codes implique une transmission non seulement au mot, mais à la lettre près depuis l'origine, sans la moindre différence orthographique, chose absolument inconcevable pour les naturalistes.

Nous avons vu en effet que les différences existant dans la version samaritaine de la Torah étaient suffisantes pour effacer l'encodage d'Aaron dans le livre du Lévitique.

On peut voir dans les deux copies suivantes du premier chapitre du Lévitique (Torah samaritaine à gauche et massorétique à droite), les différences orthographiques et grammaticales qui existent: Certaines lettres et conjonctions ont été rajoutées dans la Torah samaritaine, probablement dans le but d'en assurer la vocalisation idoine ainsi qu'une meilleure compréhension, parfois un mot est absent, ailleurs un mot est au pluriel au lieu du singulier: 

Lévitique: Chapitre 1

L'origine de la Torah samaritaine remonte à l'époque de la conquête du royaume nord d'Israel par Salmanasar, roi d'Assyrie en 722 av.J-C. Israel était alors divisé en deux royaumes depuis plus de deux siècles:

- Celui du sud, ou royaume de Judah, d'après le nom de sa principale tribu (le mot "Juif" en Français vient de "Judah"), avec pour capitale Jérusalem.

- Et celui du nord, la Samarie (Shomron), d'après le nom de sa capitale, composé des dix autres tribus d'Israel, aussi appelé "Ephraïm" (une des dix tribus du nord) dans la Bible, ou simplement "royaume d'Israel".

Les Assyriens déportèrent la majeure partie de la population, qu'ils remplacèrent par d'autres peuplades de pays conquis. D'après le récit du deuxième livre des Rois (2Rois 17), ces dernières adoptèrent la religion du pays qui leur fut enseignée par d'anciens prêtres israelites revenus de la déportation, tout en gardant leurs anciennes croyances et coutumes. 

Ce fut la fin des dix tribus du nord d'Israel; certains de leurs descendants se seraient mélangés à cette population hétéroclite, qui donna naissance à la communauté samaritaine, qui existe encore aujourd'hui en Israel bien qu'en voie de disparition (il n'en reste que sept cent âmes environ)       

A la différence des Juifs, les Samaritains n'acceptent que l'autorité du Pentateuque de Moïse (la Torah), et refusent les autres livres du TANAKH juif et sa tradition orale. Ils ne reconnaissent pas non plus la centralité du culte du temple de Jérusalem; ils établirent leur propre lieu saint sur le mont Garizim.   

Les récits historiques et les Evangiles nous relatent que Juifs et Samaritains se méprisaient réciproquement.

Les différences entre la Torah des Juifs et celle des Samaritains peut s'expliquer par le fait que chez ces derniers, les copistes ne transcrivait pas le texte sacré avec la même rigueur que leurs homologues Juifs. Déjà depuis la division du royaume d'Israel en 931 av.J-C, les rois du nord, qui s'étaient dissociés du culte central du Temple de Jérusalem, avaient pris certaines libertés dans la pratique du culte, en opposition avec les commandements stricts de la Torah, en établissant deux autres lieux saints et en désignant des prêtres qui n'appartenaient pas à la tribu de Levi, la seule autorisée à exercer le sacerdoce, et dont les prêtres étaient les gardiens  de l'Arche d'Alliance, contenant les tables de la Loi, et possiblement des rouleaux de la Torah originelle.

Ensuite, avec la création de la nouvelle communauté samaritaine, le fossé s'est creusé encore davantage, le caractère sacré de la lettre aurait ainsi perdu de son importance chez les Samaritains, les copistes se souciant avant tout de transmettre le sens du texte. Cela expliquerait l'addition importante des lettres "vav" et "yod", servant de support aux voyelles "I" et "O", dans la Torah samaritaine, afin d'éviter de confondre les mots.

La conséquence de ce laxisme est aujourd'hui évidente: On ne retrouve aucun code dans la Torah samaritaine, pas plus que dans d'autres livres.

Seule la torah massorétique contient des codes.

La transmission du texte massorétique

Le texte massorétique est considéré par les Juifs pieux comme la réplique exacte de la Bible originelle.

Il est nommé ainsi en référence aux massorètes, copistes juifs du Moyen-Age qui, à la suite des scribes (soferim) travaillèrent à la transcription du texte sacré entre le 7ème et le 11ème siècle, en terre d'Israel et en Babylonie.

L'origine du mot vient de "massorah", étymologiquement "lien"; il a acquis le sens de "tradition" et "transmission".

Les massorètes étaient des "maitres de la tradition", ce sont eux qui ont introduit le système de signes (nikkudot) pour fixer la vocalisation du texte ainsi que sa cantilation, tout en préservant le texte d'origine, car il ne se seraient jamais permis de modifier la moindre lettre.

Cependant, l'origine de la massorah est bien antérieure à cette période, elle est la fixation écrite par les scribes de la tradition orale transmise de génération en génération.

 

La première mention des scribes se trouve dans la Bible, dans le livre d'Ezra, a l'époque de la construction du second Temple (516 av.J-C):

Cet Ezra monta de Babylone ; c'était un scribe, versé dans la loi de Moïse donnée par l'Éternel, le Dieu d'Israël...

Car Ezra avait appliqué son cœur à étudier et à mettre en pratique la loi de l'Éternel et à enseigner en Israël la règle et le droit.

Esdras 7:6-10


Le mot "scribe" (sofer) a la même racine que le verbe "compter" (lispor); car la tâche du scribe ne consistait pas seulement à copier les textes sacrés, ils comptaient aussi les lettres, afin de s'assurer de la conformité de leurs copies; ils comptaient également les mots et le nombre de lois afférentes à une catégorie donnée. [wikipedia]

Les scribes étaient également des érudits et des enseignants de la Torah, ils étaient pour cela hautement considérés; beaucoup faisaient partie de la Grande Assemblée des Sages d'Israel, comme le mentionnent également les Evangiles.

C'est l'Assemblée des scribes, a l'époque d'Ezra, qui fixa le canon du TANAKH et l'ordre de ses livres.

Ezra, en outre, était un prêtre (cohen) de la lignée d'Aaron.

 

La massorah est l'oeuvre des scribes, elle est en soit un procédé technique d'annotations en marge du texte sacré, visant à sa préservation exacte.

Rabbi Akiba affirmait déjà au 2ème siècle: "La massorah est une haie à la Torah"

 

Ces annotations remplissaient plusieurs fonctions:

  • Le comptage des lettres et des mots: C'est la massorah numérique.

En voici quelques exemples pour avoir une idée du travail que cela représentait:

- Ils comptaient le nombre de lettres de chaque livre; ainsi, ils savait depuis longtemps que la Torah contient exactement 304 805 lettres, pas une de plus ni une de moins.

- Ils comptaient le nombre d’occurrences de chaque lettre de l’alphabet.

- Ils repérèrent la lettre médiane de chaque livre: Ainsi dans le verset de Lévitique 11:42, la lettre vav est agrandie pour indiquer qu'elle est la lettre centrale de la Torah. Dans le verset 14 du Psaume 80, la lettre yod est suspendue pour indiquer qu'elle tient le milieu du Psautier.

  • Une fonction grammaticale, qui spécifiait par exemple l'utilisation de certaines lettres telles que le vav comme consonne ou voyelle, ou bien l'écriture pleine ou défective d'un mot, qui pouvait s'écrire avec ou sans ces mêmes lettres (vav ou yod)
  • Il y avait aussi des notes relatives a certaines lettres qui devaient être écrites plus grandes ou plus petites que le corps du texte, sans qu'il y ait systématiquement une explication donnée.
  • Des notes relatives à des mots dont la prononciation diffère de ce qui est écrit: Nous avions vu l'exemple du mot "ligne", se rapportant a la circonférence de la "mer de bronze".
  • Une fonction exégétique enfin.

La massorah est définitivement achevée au 10ème siècle avec les signes de vocalisation et de cantilation.

 

La transcription du texte de la Torah, ainsi que des autres livres du TANAKH, était et est encore aujourd'hui considérée par les Juifs comme une des taches les plus sacrées qui soient depuis; pour accomplir ce travail, il faut se conformer à un rituel précis, à la limite de la perfection.

 

Le Talmud énumère plus de vingt prescriptions obligatoires pour qu'une copie de la Torah soit déclaré valide à l'usage sacré (kosher):

  • Le scribe doit être un Juif pieux et éduqué, ayant été formé spécialement pour accomplir cette tâche.
  • Le matériel utilisé, parchemin, encre et plume doivent être strictement conformes quant à leur origine et leur préparation spécifiques à cet usage.
  • Le scribe ne doit pas écrire une seule lettre de mémoire, il doit avoir en permanence un rouleau authentique, kosher, ouvert devant lui.
  • Il doit prononcer chaque mot à voix haute avant de le copier.
  • La longueur de chaque colonne doit être de 48 lettres minimum et 60 maximum.
  • La largeur de la colonne doit être de 30 lettres.
  • Il doit mettre l'espace d'un cheveu entre deux lettres, l'espace d'une lettre entre deux mots, l'espace de neuf lettres entre deux sections (parasha), trois lignes entre chaque livre.
  • Le cinquième livre de Moïse doit s’achever exactement à la fin d’une ligne.
  • S'il manque une seule lettre, ou s'il s'y trouve une lettre en trop, le rouleau entier est invalidé.
  • Si une lettre touche une autre lettre, le rouleau est invalidé.
  • Si une lettre est illisible, ou ressemble a une autre lettre, le rouleau est invalidé.
  • Toute erreur doit être corrigée dans les trente jours sous peine de voir le rouleau entier disqualifié.

 

Tout rouleau qui ne respectait pas scrupuleusement ces règles devait être détruit ou enterré, au mieux relégué aux écoles pour la lecture.

Seul un rouleau certifié kosher pouvait être utilisé pour la lecture publique et lors des offices dans les synagogues.

Toute copie vieillie ou en mauvais état devait également être enterrée avec respect et solennité; c'est la raison pour laquelle, contrairement au Nouveau Testament, très peu de copies anciennes de la Bible hébraïque nous sont parvenues.

Même l'état d'esprit du scribe devait être totalement dirigé sur sa copie, il ne devait pas dévier un seul instant de son intention (kavanah) sous peine de voir son rouleau entier disqualifié.

 

Le Talmud rapporte ainsi les paroles que Rabbi Yismael, un sage du 2ème siècle, adressa a son disciple: 

Quand Rabbi Meir vint rencontrer Rabbi Yismael pour étudier la torah, il lui fut demandé:

"Quelle est ta profession, mon fils?"

"Je suis un scribe," répondit-il.

Il lui dit alors: "Mon fils, sois très attentif à ton travail, car c'est un travail sacré; tu pourrais par mégarde oublier une lettre, ou ajouter une lettre, tu détruirais alors tout l'univers."

Talmud: Eruvin 13a

 

On ne peut pas concevoir une telle recherche de la perfection si on ne connait pas le degré de dévotion que le Juif porte à la Torah, qu'il considère comme un don parfait de D.ieu.

Le Juif vit par et pour la Torah, sans elle son existence n'aurait ni sens ni but. L'histoire est parsemée de témoignages de Juifs pieux qui sacrifièrent leur vie pour sauvegarder les rouleaux de la Torah.

 

Ainsi, par cette vénération du texte sacré, et cette méthode de transcription unique au peuple juif, aussi incroyable que cela paraisse, le texte de la Torah, vieux de 3500 ans, nous est parvenu pratiquement sans erreurs, à la lettre près.

Plusieurs faits historiques, avant la découverte récente des codes, corroborent cette hypothèse:

Le texte de la Torah lui-même nous apprend que Moise confia ce livre aux prêtres Lévites, descendant d'Aaron, qui furent chargés de sa transmission:

Lorsque Moïse eut achevé d'écrire dans un livre les paroles de cette loi (Torah) jusqu'à la fin, il donna cet ordre aux Lévites qui portaient l'arche de l'alliance de l'Éternel : Prenez ce livre de la loi (Torah) et mettez-le à côté de l'arche de l'alliance de l'Éternel, votre Dieu ; il sera là comme témoin contre toi.

Deutéronome 31:24-26

 

D'après le Talmud, et plusieurs historiens du 1er siècle, le rouleau de la Torah originel était exposé dans la cour du Temple à disposition des copistes; parmi les dignitaires du Temple se trouvaient en outre des correcteurs payés des textes bibliques.

Une telle copie est mentionnée dans la lettre d'Aristée. Philon d'Alexandrie et Flavius Josèphe affirment également que le texte de la Torah n'a jamais été altéré. [wikipedia]

Dès le premier siècle, le texte massorétique était perçu comme l'exacte transcription du textus receptus. 

 

La destruction de Jérusalem et du Temple par les armées romaines en l'an 70 de notre ère, accentua la dispersion du peuple juif, dans tout l'empire romain et au-delà, dans la péninsule arabique et l'Asie centrale.

La perte du centre religieux et culturel que représentait le Temple de Jérusalem avec sa caste sacerdotale aurait pu affecter alors irrémédiablement la transmission des textes de la Torah et du Tanakh, comme nous l'avons vu avec la Torah samaritaine; il n'en fut rien, les Juifs pieux, considérant leur survie entièrement liée à la transmission de ces textes, perpétuèrent fidèlement les règles de transcription précises et la tradition orale. C'est à cette époque que commença la rédaction du Talmud et que la synagogue devint le centre de la vie religieuse et culturelle juive, l'enseignement étant transmis par les rabbins.


Une des meilleures preuves de cette transmission quasi parfaite de la Torah se trouve en fait dans les erreurs de transcriptions elles-mêmes, inévitables du fait de la dispersion. Après la dispersion, la diaspora juive se scinda en trois principales communautés:

  • La communauté ashkénaze en Europe septentrionale et orientale
  • La communauté séfarade en Espagne et en Afrique du Nord
  • La communauté yéménite dans la péninsule arabique et l'Asie centrale

La communauté juive yéménite, certainement la plus ancienne, a été l'une des plus isolées, car elle restée pratiquement sans contacts pendant plusieurs siècles avec les Juifs des autres communautés.

Or, en comparant les rouleaux de la Torah transmis indépendamment par chaque communauté, on constate que la Torah yéménite diffère des autres uniquement de 9 lettres, sur un total de 304 805 lettres, soit un taux d'erreur de 1 sur 33 867 (0,000029)

 

On peut donc raisonnablement en conclure que la Torah actuelle ne diffèrerait du texte originel que d'à peine une poignée de lettres.

Un taux d'erreur si faible est insuffisant pour altérer les codes qui y sont restés cachés durant près de 3500 ans!

 

Une telle précision est d'autant plus impressionnante si on compare la Torah a d'autres textes anciens qui lui sont postérieurs.

Si on considère par exemple les nombreux manuscrits grecs du Nouveau Testament (celui-ci contient un nombre de mots comparable à la Torah), ils sont remarquablement uniformes quant au sens du texte, ils diffèrent cependant les uns des autres de plusieurs milliers de variantes orthographiques et syntaxiques.

Cependant, de plus en plus de chercheurs considèrent aujourd'hui que ces textes grecs ne seraient en fait qu'une traduction d'un Nouveau Testament araméen antérieur (peshitta), dont les auteurs, ne l'oublions pas étaient presque tous des Juifs.

 

Instruits de tous ces faits, en particulier l'attention extrême que les scribes juifs portaient à leurs manuscrits avec une rigueur hors du commun, la découverte de codes de plus en plus nombreux et défiant la raison va nous conduire progressivement dans une dimension insoupçonnée du texte biblique.